Réflexions sur l'avenir du monde, de la politique et de la gauche

Reconstruire la gauche pour un meilleur futur


En partant d'un constat de l'état de la politique et des mouvements sociaux, en France et dans le monde entier, réfléchissons sur le futur des mouvances de gauche et du rôle qu'elles pourraient jouer dans la construction de modes de vie alternatifs aux nationalisme et capitalisme actuellement présents.


Cet article vient en réaction à ce qu'il a pu se passer dernièrement en France (quinquennat de François Hollande et mobilisations contre celui-ci, élections de 2017, etc.), mais ce qui y sera dit peut sans doute être étendu dans une certaine mesure au reste du monde.

Nous allons donc d'abord revenir sur ce qu'il a pu se passer ces dernières années en France et ailleurs, puis évoquer les risques déjà présents et ceux qui risquent de s'aggraver et enfin envisager comment une reconstruction de la gauche pourrait permettre d'apporter des solutions dans les bonnes conditions.

EDIT : L'article étant assez long, il est également disponible en PDF en téléchargement en cliquant ici.

Couverture : fresque sur une école zapatiste - Source


La gauche et ses échecs, la victoire du capitalisme et la montée du nationalisme

Commençons par regarder ce qu'il a pu se passer depuis deux siècles, ou comment la gauche a échoué à s'imposer comme modèle face à la mondialisation libérale et au repli xénophobe nationaliste.

Les débâcles de la gauche

La gauche comme force politique est née dans la contestation des anciens régimes, tels que celui du royaume de France lors de la Révolution française, et s'est répandue au 19ème siècle lors des mouvements sociaux prenant place dans un certain contexte (les révolutions industrielles, la chute de la noblesse et du clergé, la montée de la bourgeoisie et du capitalisme, le colonialisme, les guerres en Europe, la montée des nationalismes, etc.).
L'objectif des mouvements de gauche est d'atteindre un niveau de liberté, d'égalité et de justice sociale pour toustes, de réappropriation commune des moyens de production, amélioration des conditions de vie en particulier des classes populaires et d'être un contre-pouvoir progressiste face au conservatisme.
La gauche est divisée entre différents courants de pensées, tels que le socialisme, le communisme ou l'anarchisme, chacun cherchant à améliorer la société à sa propre manière.
L'Association Internationale des Travailleurs (AIT) fut
la Première Internationale et est notamment connue pour les débats
entre les partisans de Karl Marx et de Mikhaïl Bakounine
Un bouillonnement intellectuel, social et militant agita la deuxième moitié du 19ème siècle, notamment lors d'événements tels que les Internationales. Des expériences permirent de mettre à l'épreuve certaines des idées de la gauche, comme la Commune de Paris en 1871.
Mais l'événement qui eut l'impact le plus important dans l'imaginaire de la gauche fut la Révolution russe de 1917 : un gigantesque soulèvement populaire, inspiré par des idées de gauche mais autonome dans un premier temps, qui a renversé le régime des tsars pour y établir un gouvernement de soviets (soviet est le terme russe donné aux conseils autonomes d'ouvriers, de paysans ou de soldats). Ce gouvernement sera finalement contrôlé par les bolcheviks, à travers les personnages de Lénine, puis de son successeur, Staline.
Mais les rêves d'état communiste, de dictature prolétarienne et de redistribution des richesses ont en réalité aboutit à un peuple contrôlé par un gouvernement répressif, une bureaucratie servant ses propres intérêts plutôt que celui des classes populaires.
L'expérience russe a marqué le 20ème siècle et la gauche car elle a échoué à s'imposer comme modèle dominant tandis que le modèle capitaliste américain semble s'être répandu partout.
Cependant, la gauche n'est pas morte pour autant. Dernièrement, on a pu retrouver un certain engouement autour de plusieurs mouvements de gauche (ou du moins qui s'en rapprochent) partout sur Terre : le mouvement zapatiste au Mexique, les printemps arabes, des personnalités comme Bernie Sanders et Jeremy Corbyn, des groupes politiques comme Podemos et France Insoumise ou encore des mobilisations importantes, comme Occupy, les Indignados ou Nuit Debout.

La gauche a toujours été clivée entre différentes conceptions : gauche communiste/gauche socialiste, libertaire/autoritaire, mutualiste/collectiviste, réformiste/révolutionnaire, etc. et également autour de désaccords sur les luttes qui doivent converger : toute la gauche n'a pas la même position sur des points tels que le féminisme, l'antiracisme, l'anticolonialisme, l'internationalisme, l'écologisme, etc., souvent parce que chacun•e a des difficultés à remettre en cause ses propres privilèges ou a été formaté pour penser que ces problèmes n'en sont pas. Toutes ces divergences compliquent les possibilités de former un mouvement uni et cohérent.
Je ne pense pas en revanche qu'il y ait un véritable clivage entre intellectuel•le•s de gauche et masses populaires de gauche. Les premiers s'intègrent souvent aux deuxièmes. La lutte est commune, l'un ne va pas sans l'autre.
Par contre, il existe bel et bien un clivage entre l'ensemble des personnes ayant des idées de gauche et les personnalités politiques qui s'en revendiquent. C'est le problème avec la professionnalisation et de l'hyper-personnalisation de la politique. La politique telle qu'elle est abordée actuellement se résume à des politicien•ne•s illustrant le visage d'un parti qui s'affrontent sur l'échiquier politique pour avoir le meilleur poste possible. Les idées s'effacent derrière des visages, des caractères, des égos que chacun incarne. Et lorsque ces individus s'éloignent de ce qu'on pourrait attendre de la part de quelqu'un de gauche alors qu'iels sont au pouvoir, on courre droit vers quelque chose qui ne conviendra à personne, de gauche ou pas.

Mais le véritable coupable des échecs les plus récents des politiques (supposées) de gauche, est à mon avis dû au rapprochement de la gauche avec des idées libérales. En effet, l'aile droite de la gauche, chez les socialistes tout particulièrement, s'éloigne des objectifs sociaux à atteindre en tentant des compromis, des pactes, des alliances avec l'idéologie capitaliste. La gauche de gouvernement (on peut se demander si cette gauche de gouvernement est vraiment de gauche), en tout cas en France lors des présidences de Mitterrand et de Hollande, n'a pas apporté ce que certain•e•s espéraient. La social-démocratie et le social-libéralisme sont les orientations majeures du Parti Socialiste et celles-ci sont les meilleures complices du capital.
Le dernier quinquennat français a permis de confirmer que le PS avait une politique de droite : Loi Travail, usage du 49.3, débats sur la déchéance de nationalité, islamophobie, rapprochement avec le patronat, etc. Des mesures contraires aux valeurs qu'on attendrait d'un gouvernement dit de gauche, mais pas si surprenantes quand on regarde de quelle gauche il s'agit. Et le gouvernement Macron sera dans la continuité de la politique de Hollande...
Ce qui peut rassurer un peu, c'est qu'il semble que le PS soit en grave déclin. Reste à savoir vers quoi celleux qui adhéraient aux idées socialistes vont se diriger et qu'est-ce qui va émerger à la place...


Capitalisme, mondialisation et libéralisme

C'est le modèle dominant depuis la fin de la Seconde Guerre Mondiale : le capitalisme américain s'est répandu partout et est devenu la norme.

L'idéologie du capitalisme, c'est que n'importe qui peut devenir le meilleur, le plus riche, le plus puissant, à condition d'écraser les autres. Le capitalisme repose principalement sur un système de propriété privée des moyens de production et sur l'économie, les marchés, la finance, la bourse, la méritocratie, la consommation, la concurrence et la compétition. C'est un sport, un sport auquel les meilleurs gagnent et où les plus faibles servent les meilleurs.
Des afro-américain•e•s faisant la queue devant un panneau
publicitaire vendant le rêve américain après une inondation
à Louisville en 1937, photo de Margaret Bourke-White
Le capitalisme s'illustre parfaitement dans le rêve américain : le story-telling de selfmade-men, de battants individualistes, qui se construisent des empires financiers en idéal, et au pire, l'espoir d'une simple vie de classe moyenne, d'une maison, d'un travail et d'une famille. Quelques exemples de réussite parviennent à masquer tous les échecs, qui existent bel et bien. Tout s'achète, tout se vend. Celleux qui possèdent ont le pouvoir. Toustes sont réduits à participer au fonctionnement consumériste de la société de consommation pour pouvoir survivre.
La dynamique de l'économie de marché a permis à ce modèle de se diffuser sur l'ensemble du globe, en Europe, au Japon, en Corée, en Inde, en Chine, etc. Si un pays souhaite être puissant sur le plan économique, la solution la plus sûre est le capitalisme.
L'ordre mondial repose aujourd'hui sur l'équilibre très instable créé par l'économie capitaliste.
Le problème n'est pas la mondialisation en elle-même, mais la façon dont elle s'est faite : l'imposition du modèle occidental comme norme économique, sociale, politique, culturelle, religieuse qui domine les autres...

Le capitalisme ne serait rien sans le libéralisme, ce courant politique soit-disant "ni de droite ni de gauche" (de droite camouflée) qui fonctionne en tentant de faire croire que n'importe qui est libre de faire n'importe quoi. Le libéralisme repose sur les libertés individuelles et l'individu tout court. Il se présente comme une avancée sociale et si il a effectivement légitimé quelques revendications sociales, cela s'est toujours fait de manière insuffisante et permet toujours à des classes dominantes de conserver leur privilèges.
Le libéralisme ne voit pas les inégalités pourtant bien présentes. Impossible de déterminer quelles classes sont dominées par d'autres lorsqu'on présente celles-ci comme des sommes d'individus en pleine possession de leur libre-arbitre et jamais influencés par la structure sociétale. Selon le libéralisme, si une personne a réussi c'est parce qu'elle s'en est donné la peine et l'a mérité et si une personne échoue c'est parce qu'elle n'essaye pas d'y arriver. Le libéralisme tente d'ignorer le fait que la place que l'on a dans la société est d'abord déterminée par les conditions sociales et matérielles dans lesquelles chacun•e vit et se base sur les rares exemples de personnes qui ont réussies à dépasser ces conditions pour nier l'existence de celles-ci. Pourtant, pour chaque personne qui parvient à dépasser sa condition de base, dix autres n'y parviennent pas.
Le libéralisme social encourage chacun à agir selon son propre intérêt, sans considérer celui des autres, ce qui complète très bien le libéralisme économique, à savoir la libre circulation des capitaux, la concurrence, l'initiative individuelle plutôt que collective. Un jeu auquel les possédants jouent la vie des travailleur•euse•s.
En somme, le libéralisme c'est la liberté des plus puissants d'être puissants et des plus faibles d'être faibles.

Bien qu'ils tentent de le cacher, le capitalisme et le libéralisme augmentent les inégalités au lieu de les combler. Les plus riches sont de plus en plus riches, les plus pauvres sont de plus en plus nombreuxses. Un rapport de l'Oxfam publié début 2017 montre que huit hommes possèdent autant que la moitié de la population mondiale, chiffre terrifiant qui appelle à une répartition équitable des richesses. Une tendance qu'on retrouve également en France : les 10 % les plus aisés captent plus du quart des revenus selon le Centre d'observation de la société, soit plus que ce que reçoit la moitié de la population française la plus pauvre.
La bourse, le marché de l'offre et de la demande, l'emploi, voilà ce qui régit aujourd'hui le monde. Tandis que certain•e•s jouent en bourse l'avenir de l'économie, nos vies sont dédiées à l'aliénation au travail au service des propriétaires, des patrons, des possédants. On ne peut pas vivre sans travailler (à moins d'être héritier). Nos vies tournent autour de l'emploi. Quel que soit son opinion politique sur le sujet, on ne peut pas s'en passer, d'autant plus lorsque le consumérisme nous pousse à posséder, consommer et payer toujours plus.
La dernière invention formidable du capitalisme, c'est l'uberisation (mais Uber n'est pas le seul coupable) de la société : n'importe qui peut devenir son propre patron et s'exploiter ellui-même en proposant des services payants (services qui se faisaient auparavant sur la base de solidarité coopérative : auto-stop, covoiturage, couch-surfing, squat, etc.). Uber, Airbnb, Deliveroo,... des compagnies qui donnent certes des possibilités de rémunération, mais dans quelles conditions ? Les contrats précaires sont de plus en plus nombreux et les emplois stables sont de plus en plus rares. Les services sont privatisés, les ressources qui devraient être accessibles à toustes sont marchandées. L'emploi prends des formes dans lesquelles les individus se soumettent d'elleux-mêmes au travail, rendent leurs vies entièrement dépendantes de celui-ci, ce qui est très franchement inquiétant pour l'avenir.

Bref, le capitalisme s'est répandu partout, et si nombreuses sont les personnes qui désirent s'y opposer, difficile de le faire pleinement puisqu'il contrôle l'ensemble de notre vie.
Mais là où les valeurs de la gauche pourrait mobiliser les esprits désireux de changement, on remarque que beaucoup (et notamment  une bonne partie des classes les plus touchées par le capitalisme) se tournent au contraire vers l'extrême-droite qui désigne pourtant un autre (faux) coupable : l'étranger.


Replis identitaires, nationalistes et racistes

Parfois présenté en apparente opposition au capitalisme (en fait, c'est l'aspect humain de la mondialisation qui les dérange), les mouvements d'extrême-droite et/ou nationalistes ont le vent en poupe.

Le nationalisme est un mouvement qui s'est également particulièrement développé au 19ème siècle (on l'appelle d'ailleurs parfois le siècle des nationalismes) en Europe et est à l'origine des tensions qui ont mené à la Première Guerre mondiale.
Les empires coloniaux sont puissants et cherchent à posséder le territoire le plus grand possible. Afin de s'assurer du soutien des populations présentes sur les territoires, les pays vont se penser comme des nations unes et indivisibles et encourager les populations à se voir comme un peuple uniforme lié par une identité nationale. Mais la construction d'un amour de la patrie passe forcément par la haine de celle des autres.
Le manuel d'Histoire de France
d'Ernest Lavisse a diffusé dans toutes les
écoles son idéologie patriotique
Un exemple fort de nationalisme et de ce dont il est capable est le cas de l'Alsace-Moselle. Cette région est située entre la France et le Saint-Empire romain germanique/Empire allemand/Allemagne (selon l'époque) et a appartenu à ces derniers du 10ème au 17ème siècle avant d'être rattachée progressivement à la France entre le 16ème et le 18ème siècle. Mais la France doit céder une partie de cette région à l'Empire allemand lors du traité de Francfort en 1871 pour mettre fin à la guerre franco-prussienne de 1870-1871. Elle les récupérera finalement en 1919, lors du traité de Versailles après la Première Guerre mondiale. La propriété de cette région a justifié la haine franco-allemande qui s'est amplifiée de 1871 à 1914. On remarque lors de cette période un grand développement du sentiment national, qui passe notamment par la presse, l'école et l'enseignement de l'histoire, où cette région sera instrumentalisée pour encourager à la mobilisation de la défense du territoire.
Le patriotisme et le nationalisme sont des idées dangereuses qui fonctionnent très bien (partout, pas seulement à l'extrême-droite) parce qu'il est facile et rassurant de se rassembler derrière une identité commune. Mais cette identité permet d'ignorer les inégalités et les rapports de forces qui y ont lieu à l'intérieur. Les dominants ont donc tout intérêt à encourager la pensée nationale.

Le nationalisme va de pair avec le racisme, puisqu'il s'agit de penser en terme de supériorité d'un peuple sur un autre. Ainsi, le racisme, déjà omniprésent avec le colonialisme occidental, est décuplé par l'identité nationale associée aux bases raciales de hiérarchisation et de domination. Ces discriminations se font principalement sur la couleur de peau, la culture et la religion et ne se limitent pas à l'extrême-droite (c'est tout le problème), même si cette dernière se base le plus clairement sur le racisme.
Le concept d'identité nationale permet de légitimer auprès de la population des paroles et des actes xénophobes (négrophobie, antisémitisme, islamophobie) et de permettre une politique répressive et contraignante (fermeture des frontières, refus de l'accueil des réfugié•e•s, état policier, conflits militaires, etc.).
Car on a pu le voir un peu partout : les courants d'extrême-droite sont de plus en plus populaires et des personnalités idolâtrant le patriotisme comme Trump, Le Pen ou Poutine sont au pouvoir ou n'en sont pas passés loin.
Et je ne parle même pas du fascisme dans sa forme la plus violente et assumée qui semble revenir en force (néo-nazis, KKK, suprémacistes blancs, milices identitaires) alors que le front antifasciste n'existe plus qu'au sein de quelques groupes de gauche.
Pourtant, même si les extrême-droites tentent de se détacher de cette image et de se dé-diaboliser, il n'en restent pas moins des partis fascistes, racistes et dangereux.

Pourquoi cette remontée de l'extrême-droite ? Certain•e•s ont tenté de l'expliquer en parlant d'une normalisation des idées de l'extrême-droite. Ce n'est pas faux, mais je pense qu'il faut plutôt le voir dans l'autre sens, c'est-à-dire comme le fait que la norme se rapproche de l'extrême-droite. Comme le dit fort justement Julien Salingue lors de la présidentielle française : "ce n'est pas tant Le Pen qui c'est normalisée que le normal qui s'est lepenisé".
Non seulement l'extrême-droite a réussi à se dédiaboliser d'elle-même, non seulement reçoit-elle l'aide des médias qui l'invite régulièrement (Philippot est présent tous les jours sur les plateaux télé ou radio), mais le principal problème est que certaines idées de l'extrême-droite se retrouvent ailleurs que dans ses rangs, à droite, au centre et même à gauche. Cela ce voit par exemple aujourd'hui au niveau de l'islamophobie généralisée qui n'est pas une exception d'extrême-droite mais une haine qui dépasse les divergences politiques.
L'entièreté de l'échiquier politique s'est déplacé vers la droite et l'extrême-droite. Or ce glissement n'est favorable qu'à cette dernière. On finit par "préférer l'original à la copie" (comme le dit lui-même Jean-Marie Le Pen) et on vote Front National plutôt que les partis reproduisant ses idées mais les cachant derrière un idéal républicain.

Voilà où cela nous laisse : la gauche n'a pas pu transformer la société en respectant ses valeurs ou seulement dans des conditions insuffisantes, le capitalisme s'est mondialisé et le repli dans des idées d'extrême-droite est de plus en plus courant.


Les risques qui menacent d'aggraver l'état du monde


Maintenant qu'on a vu les tendances politiques et économiques dominantes qui se dessinées ces dernières années, on peut s'intéresser aux risques que celles-ci font planer sur le futur.

Le capitalisme prend des formes toujours plus terrifiantes qui s'insinuent partout dans nos modes de vies. L'ultra-libéralisme menace, nous promettant un avenir méritocratique dans lequel nous serions totalement aliéné•e•s au travail. Les progrès scientifiques et technologiques, alors qu'on rêvait qu'ils nous libèrent du travail, semblent au contraire préparer un futur où les emplois seront toujours plus instables, où les revenus seront toujours aussi inégaux, les richesses toujours aussi mal réparties et la vie hors de la compétition économique impossible.

Le nationalisme et les politiques d'extrême-droite menacent l'équilibre instable de la paix mondiale. Condamnant les flux migratoires de la mondialisation (en se sentant légitimes quand iels le font eux-même et en ignorant les facteurs économiques et leur propre suprématie culturelle), les frontières risquent de se fermer encore plus (à l'entrée, pas à la sortie) et l'aide aux populations en danger d'être encore plus inexistantes.
Il ne faut pas laisser le nationalisme être le principal opposant du capitalisme (d'autant que les deux peuvent très bien fonctionner ensemble, comme c'est le cas actuellement) mais lui opposer un mouvement de lutte des classes.
Et ce n'est pas essayer d'atteindre vainement le point Godwin de dire que le risque de reproduire des erreurs du passé, notamment celles du siècle précédent, est très présent, mais une réalité.

Menace instrumentalisée pour faire passer les discours de haine par amalgames ainsi que des politiques restrictives de libertés, le terrorisme est néanmoins un danger réel qui frappe régulièrement des innocent•e•s. Malheureusement, on ne peut pas faire grand chose pour empêcher les actes terroristes de se produire (étant donné qu'ils peuvent avoir lieu n'importe où, n'importe quand et que ce n'est pas des décisions comme le Brexit qui permettent de miraculeusement s'en protéger, on a pu le voir), si ce n'est d'agir préventivement en limitant le trafic, la vente d'armes, les accords avec les États et organisations complices et en ne donnant pas de raison qui puisse pousser à la radicalisation du terrorisme extrémiste.
Le risque terroriste continuera malheureusement d'exister tant qu'il existera des raisons qui puissent pousser à son existence.

L'entrée dans une nouvelle grande période de guerre me semble réaliste et imminent. La possibilité d'une guerre mondiale, qu'elle soit causée par les tensions entre nations, les déséquilibres économiques ou probablement les deux, me semble hélas une réalité de plus en plus envisageable.
Les relations internationales qui sont de plus en plus chaudes, particulièrement entre plusieurs grandes puissances (USA, Russie, Corée, Chine, Union Européenne, etc.) sont à surveiller de près, le climat de guerre froide qui se réinstalle peut probablement dégénérer. La cyberguerre a déjà commencée, reste à savoir quand elle aura aussi lieu sur le terrain.
L'idéologie nationale permettra de mobiliser des troupes et de justifier la militarisation. Les morts inutiles auront lieu dans chaque camp. La possibilité d'une guerre à grande échelle est encore plus dangereuse qu'auparavant, la variante des armes nucléaires s'étant rajoutée, ainsi que toutes les nouvelles façons de tuer (armes chimiques, technologiques, biologiques ou celles qui restent encore secrètes).

Les engagements des 10 plus gros pays pollueurs - Source
La problème écologique n'est pas à négliger non plus, même si il ne touche pas tout le monde à la même échelle et peut être dur à percevoir au quotidien. Malgré le consensus scientifique, plusieurs politiques et grands groupes y trouvant des intérêts financiers n'encouragent pas l'action écologique, au contraire.
Si l'accord de Paris à la COP21 et la prise de conscience écologique de certains pays (comme la Chine) laissaient espérer une stabilisation, les récentes victoires électorales de la droite et l'extrême-droite laissent entendre un désintérêt de l'écologie, quand ce n'est pas carrément le climato-scepticisme assumé de certains gouvernements (comme les USA de Trump).

Ces futurs possibles sont sombres. Peut-on espérer un meilleur avenir ?


Une possible solution : la reconstruction de la gauche ?


Et si pour éviter le pire, la solution était d'investir dans des politiques de gauche ? Il n'est cependant pas sur que la gauche telle qu'elle existe actuellement soit en mesure de s'émanciper du capitalisme,du nationalisme et de ne pas reproduire les erreurs du passé.

Les objectifs à atteindre

Il me parait important de définir des objectifs à atteindre, afin de savoir dans quelle direction s'orienter et déterminer les luttes qui doivent avoir lieu.

La devise de la République française (une des rares choses que j'apprécie à peu près parmi ses symboles), "Liberté, Egalité, Fraternité", pourrait correspondre à un idéal à viser (en partie), à condition de développer ce que l'on entend par chacun de ces termes. Mettre des mots sur quelque chose c'est bien, leur donner du sens et les appliquer c'est mieux (et c'est pas vraiment ce qu'il se passe actuellement).
Liberté, c'est à dire la liberté de chacun•e d'agir ou d'être de quelque façon que ce soit, à condition que cette liberté n'empiète pas ni sur la liberté des autres, ni sur leur intégrité ou leur consentement. Ces conditions sont à poser pour car il faut prendre en compte les inégalités et privilèges présents actuellement, inégalités dans les libertés et inégalités dans les rapports de force au sein de la société (certaines personnes étant un position de difficultés par rapport à d'autres).
Égalité, c'est à dire l'assurance que chacun•e ait accès aux mêmes choses. Là encore, il faut prendre en compte les inégalités actuelles. L'égalité à encourager est celle qui rééquilibrerait les rapports verticaux entre catégories sociales favorisées et défavorisées, plutôt que celle qui ne corrige pas ces déséquilibres.
Ces deux concepts, liberté et égalité, sont donc à considérer ensemble, simultanément.
Fraternité, c'est peut-être un terme plus contestable. Déjà parce que rien que linguistiquement, il désigne uniquement l'union entre frères et pas forcément entre sœurs. Réjane Sénac dans Data Gueule avait proposé le terme moins masculinisant d'"adelphité" (adelphe est un mot grec qui désigne autant frère que sœur). Mais peut-être est-ce même le concept qu'il y a derrière fraternité qu'on peut remettre en cause : chercher à unir les individus par des liens "fraternels" ne mène à rien tant qu'il existe des rapports de force déséquilibrés entre elleux. Après, tout n'est pas à jeter dans l'idée de fraternité : les aspects "entraide" et "solidarité" sont par exemple intéressants.
Mais ces quelques valeurs franco-françaises ne suffisent pas : on pourrait également insister sur des valeurs comme la tolérance, la justice, la démocratie ou même des choses plus marquées politiquement, comme révolution, autogestion ou lutte des classes.

On ne peut de toute façon pas résumer la direction à prendre à quelques mots qui sonnent bien et qui font jolis gravés sur le marbre des mairies. Ces concepts ne seront pas applicables sans la fin des oppressions.
Par oppression, j'entends "oppression systémique", c'est-à-dire une oppression institutionnalisée, inscrite socialement dans le fonctionnement de la société, consciemment ou inconsciemment. Qu'il s'agisse d'oppressions de classe, de race, de genre, de sexualité, d'accès aux ressources ou de condition physique ou mentale, ces structures de domination de groupes sociaux sur d'autres sont à clairement désigner et dénoncer. On peut essayer de déconstruire ces systèmes. Ce combat doit être mené en priorité par et pour celleux qui en sont victimes. Il est important de prendre conscience de sa propre position au sein de ce système, des déterminismes sociaux qui peuvent en résulter et des actions qui peuvent être décidées pour remettre en cause ce système et en reconstruire un autre.
Lorsqu'on est en situation de non-concerné•e, mieux vaut écouter ce que celleux qui le sont ont à dire et relayer leur paroles plutôt que de s'exprimer à leur place. Mais il ne faut pas non plus sacraliser la situation de concerné•e en l'associant à la détention automatique de la vérité, car prendre conscience de l'importance de la structure n'est pas chose aisée tant elle profondément inscrite dans le fonctionnement sociétal au point d'être associé à un "ordre naturel" des choses.
Prendre conscience de l'existence d'une oppression, c'est bien, lutter contre celle-ci, c'est mieux, et ne pas se limiter à cette oppression c'est encore mieux. D'autant que souvent l'intersectionnalité de ces oppressions est ignorée, alors que c'est un facteur aggravant.

Il faut également désigner les objectifs à éviter. Il faut se détacher des idées capitalistes et xénophobes, des politiques de droite et d'extrême-droite et les combattre.
Les idées anti-capitalistes ont beau être vieilles, elles sont toujours d'actualité et même peut-être plus que jamais, puisque le capital structure la société actuelle et forge celle de demain. L'aliénation au travail, l'ultra-libéralisme, la méritocratie, les modèles économiques favorables au patronat, aux bourses, aux grands groupes, aux lobbys, ce sont des réalités à combattre. L'émancipation du capitalisme est liée à l'émancipation des autres systèmes d'exploitation et d'oppression. Elle doit animer notre lutte.
Le nationalisme est un autre ennemi. La lutte contre le capitalisme ne doit pas se faire en tant que nation (comme tente de le faire croire certaines figures de l'extrême-droite pour rameuter celleux qui en sont les premières victimes) mais en tant que classes. Se faire exploiter par des patrons français n'améliorera à la réalité des ouvrier•e•s et employé•e•s travaillant pour l'instant pour des patrons étrangers. Le nationalisme brouille les inégalités présentes au sein des nations. Quand aux classes populaires étrangères qui tentent de survivre de mieux qu'elles le peuvent, elles ne le font pas en "volant" le travail des autres. L'exploitation créé par la mondialisation ne doit pas motiver un repli nationaliste mais au contraire une reconstruction d'un système international, équitable et animé par la volonté de la construction commune et de la paix. Mais il faut également laisser la possibilité de l'auto-détermination des peuples, en particulier lorsqu'ils ont subi la colonisation ou ont été intégrés de force à une nation.


Reconstruire de nouvelles politiques

S'intéresser à l'histoire et notamment celle des mouvements sociaux peut permettre d'inspirer des idées, comprendre ce qui a pu marché, ce qui a pu ne pas marché et surtout pourquoi. Il ne faut pas tenter de cacher ce qui n'a pas fonctionné, mais plutôt réfléchir aux raisons, aux acteurs, aux contextes de ces échecs.
On peut se poser plein de questions, sur le passé et sur l'actualité. Est-ce que la prise du pouvoir des bolcheviks dans les soviets et l'établissement d'un parti unique et omniprésent n'ont pas mis fin à une révolution prolétarienne ? Est-ce que l'élection de personnalités politiques baignant dans le social-libéralisme à la tête de gouvernements permet vraiment du progrès ?
Il ne faut pas se limiter au passé mais remettre en question tout ce qui a lieu actuellement, que ce soit au sein de son propre camp politique ou de celui des autres.

J'ai pas mal insisté sur les difficultés et les échecs de la gauche. Mais on ne doit pas non plus perdre de vue ce dont des initiatives de gauche sont capables, ce qu'elles ont pu proposer voir ce qu'elles ont réussit à faire à différentes échelles.
S'intéresser à certaines époques marquées par une expérience positive de la gauche, comme l'Espagne résistante et à des zones vivant actuellement dans des modèles de gouvernement alternatifs et purement socialistes, comme la communauté zapatiste au Chiapas (Mexique) ou les ZAD en France, peut donner des idées dont on peut s'inspirer.
Les envies de plus en plus importantes d'une démocratie plus participative, bien que pas forcément animées par des objectifs de gauche, sont à encourager. Il se passe notamment des choses intéressantes au niveau local, qui peuvent permettre dans une certaine mesure une émancipation de la classe politique dirigeante.
On peut se poser des questions, notamment sur le modèle de société que l'on souhaite atteindre et les moyens à mobiliser pour l'atteindre. Quelle organisation sociétale, politique, économique ? Faut-il compter sur des actions réformistes ou révolutionnaires ? Faut-il agir par en haut ou par en bas ? Jusqu'à quel point faut-il rester dans la légalité et la non-violence face aux violences du système ?

Le débat d'idées à gauche existe depuis longtemps (au moins depuis les Internationales) et il ne doit pas s'arrêter. Ma vision des choses est qu'il est nécessaire d'avoir une gauche révolutionnaire, populaire, multiple et internationale.
Révolutionnaire, parce que même si un gouvernement adopte des réformes progressistes, rien ne garanti qu'elles soient suffisantes ou qu'elles ne soient pas révocables par la suite, d'autant qu'elles se font toujours en maintenant une classe dirigeante. Il faut donc une action révolutionnaire, qui renverse l'organisation politique actuelle et en construit une nouvelle, sans forcément de gouvernement (ou alors dans une forme très différente).
Populaire, parce que cette révolution doit partir du bas, être faîte par et pour les victimes du système actuel. Les classes populaires ont un immense pouvoir, elles sont à la base de la production des richesses. Si elles s'emparent des moyens de production, elles sont en capacité de renverser l'ordre actuel et d'en construire un nouveau.
Multiple, parce que je pense qu'engager les forces révolutionnaires derrière une seule entité est extrêmement dangereux. Il ne faut pas se ranger derrière une seule personne, encourager la présence d'un seul parti, au risque de se retrouver avec une situation anti-démocratique. Au contraire, il vaut mieux s'intéresser à la diversité des points de vues, écouter les spécialistes de chaque domaine et constituer une force politique fédérant divers mouvements, partis et individus.
Internationale, parce que cette force politique doit dépasser les limites nationales et ne fonctionnera vraisemblablement qu'à la condition d'avoir lieu simultanément dans plusieurs pays. Cet internationalisme doit se faire avec une approche décoloniale et sans chercher la concurrence et la supériorité sur d'autres pays.

Une assemblée générale de Nuit Debout à Lyon - Source

Il faut donc reconstruire une gauche et réfléchir à laquelle peut amener un bouleversement politique et sociétal suffisant, qui permettrait d'atteindre les objectifs recherchés.

Comment la gauche peut-elle agir ?

Si la gauche peut être le moteur qui nous fait aller de l'avant, comment doit-elle le faire ?

Déjà, il est nécessaire d'abandonner les visions nationalistes et libérales si l'on veut reconstruire un meilleur système non-parasité par de telles idées.
Cela signifie donc d'abandonner le clivage entre nations et la volonté de rassembler derrière une identité nationale et de passer à un schéma trans-national. Il faut revenir à la lutte des classes, celle des classes opprimées contre les classes oppressives et cesser de tenter de s'unifier derrière les drapeaux de nations complices de l'état du monde. Le schéma actuel appelle à une révolution qui dépasse les frontières.
Le libéralisme est également à abandonner, fut-ce sous la forme d'un mouvement se prétendant de gauche comme le social-libéralisme (le deuxième terme prenant le pas sur le premier). Le libéralisme économique est toujours en faveur des possédants. Le libéralisme social ferme les yeux sur les inégalités. Prêcher l'égalité ce n'est pas suffisant quand c'est juste théorique et que ça nie la réalité. Actuellement, le statut social (notamment les critères de classe, de race, de genre, d'accès aux ressources, de condition physique et mentale), à une influence sur notre propre position dans la société.

Il faut donc construire un mouvement politique puissant et présent à tout niveaux. Le militantisme doit être encouragé sous toutes ses formes, sur tout les terrains, la politique, l'espace public, l'espace privé, le terrain, la rue, internet, les productions, etc.
Il faut sensibiliser aux problématiques autour de soi, à sa propre échelle, montrer les failles du système actuel, le combattre et en proposer un nouveau.
Il faut se mobiliser, par des luttes, des manifestations, des pétitions, des marches et des grèves, le seul vrai pouvoir qui a un impact et qui peut être utilisé par les peuples pour contester les puissants.
Les acteurices de ce combat doivent être nombreuxses et diversifié•e•s. Je ne sais pas si on peut et même doit compter sur les forces politiques légitimes (membres du gouvernement, assemblée nationale, élu•e•s, etc.). Mais les militant•e•s, les associations, les groupes, les partis, les mouvements, les syndicats peuvent constituer une force multiple, diverse et puissante.
Ce combat peut être décourageant et effrayant, mais il doit être mené.

Un manifestant à Rennes fait face à un policier qui pointe une arme sur lui - Source

Ce mouvement doit également continuer à être intellectualisé et politisé, que ce soit dans le monde universitaire ou le monde militant. La multiplication des études universitaires depuis le milieu du 20ème siècle, les différentes studies (gender, post-colonial, cultural, queer, etc.) dérivant de la French Theory, ont permis d'exposer clairement des réalités et des inégalités combattues par des militants. Les liens entre études universitaires et militantisme sont à encourager et renforcer.
Le courant par lequel ces problématiques doivent être abordées doit être réfléchi. J'ai déjà parlé du libéralisme et en quoi il ne convenait pas mais ce n'est pas pas le seul. L'essentialisme, c'est-à-dire le courant qui pense que les choses sont telles qu'elles sont par essence, "par nature", est à bannir de nos luttes et à combattre car il empêche toute forme de contestation (il est malheureusement ancré dans l'esprit de beaucoup).
On peut justement lui opposer le matérialisme marxiste (en référence au matérialisme historique ou dialectique de Marx et Engels) qui se base sur la réalité des conditions matérielles, ainsi que le constructivisme social qui montre que ces réalités sont le résultat de constructions sociales plutôt que celles d'un "ordre naturel" et qu'on peut donc les déconstruire.

Il faut organiser une convergence des luttes, même si j'en parlerais plutôt en terme de fédération des luttes.
Faire converger des luttes différentes mais rentrant dans les idéaux de gauche est vu comme une méthode essentielle du monde militant. Si je suis d'accord sur l'idée générale, je préfère en parler au sens de fédération plutôt que convergence. La convergence sous-entend une certaine proximité centralisée imposée entre les différentes luttes et celleux qui les mènent. La fédération, telle que je l'entends, souhaite un système de lutte commun mais décentralisé, principalement dans le but de tenter d'éviter que les schémas de domination sociétale ne se reproduisent au sein de ces luttes.
Cependant, il me semble vraiment important que ces luttes aient lieu simultanément sur tous les terrains, contre toutes les oppressions.

Il est temps que la gauche se reconstruise, elle ne peut pas rester telle qu'elle est actuellement, au risque de disparaître. Elle doit se réinventer, revenir à certaines choses qui ont été oubliées tout en s'actualisant pour faire face à l'évolution du monde.
J'invite toute personne se revendiquant de gauche à participer aux débats et celles qui se posent quelques questions sur la politique sans trop s'y connaître à s'y intéresser un peu plus.

Conclusion


Voilà donc quelques-unes de mes réflexions actuelles sur l'état actuel et l'avenir du monde, de la politique et de la place que la gauche doit y jouer.
J'ai parfois du mal, en toute sincérité, à comprendre pourquoi on adhère pas automatiquement aux idées de gauche, tant elles me semble des valeurs évidentes. C'est sans doute mon côté utopique et optimiste. Mais l'explication est sans doute la suivante : l'humain n'évolue pas pour le moment dans un espace propice aux développement de ces idées, la structure du système dans lequel il vit s'assurant de l'existence du chacun pour soi, de la loi du plus fort et des rapports de domination et d'oppression permettant aux classes privilégiées de se maintenir en position de supériorité tout en délégitimant toute tentative de rébellion des victimes de ce système.
Si ce système évolue vers ce que la gauche peut proposer, il est probable que les valeurs qui me semblent si évidement nécessaires soient bien plus largement répandues.

Il faut donc imposer nos idées, nos grilles de lecture et rendre les valeurs de gauche omniprésentes. Il faut reconquérir l'espace public, la rue, parce que c'est elle qui fait peur aux pouvoirs publics. Il faut se mobiliser au travail, se regrouper en syndicats, faire grève, s'emparer des moyens de productions.
Les victimes du système doivent être les premières actrices de cette lutte et celles qu'il faut reconvaincre de nos idées en priorité. Il fut un temps où la principale force politique des classes populaires était celle de la gauche, mais elle a cédé en partie au populisme de l'extrême-droite. Il est primordial de les remobiliser dans la bonne direction, leur démontrer que le responsable de leur position n'est pas l'immigration mais le système capitaliste.
Il faut réinvestir les médias, culturels, de divertissement et d'information. La représentation a de l'importance. Il faut qu'il y ait des voix qui expriment nos opinions. Les nouveaux médias comme internet le permettent bien sûr (et la concurrence est rude en face, avec l'extrême-droite et les réseaux complotistes) mais il ne faut pas délaisser les anciens. La télévision a toujours une place centrale dans la vie de beaucoup, mais malheureusement le contenu qui y est présent est décidé par des individus qui ont souvent peu d'intérêt à faire entendre notre voix.
La presse est primordiale, il faut fournir une alternative puissante à la fabrique de la pensée que sont les journaux télévisés. Ce que font des journaux comme Médiapart, Le Monde Diplomatique, Politis, Ballast (pour en citer quelques-uns) et divers papiers locaux (comme le Bondy Blog) permettent cette alternative. Mais leur relative complexité les ferme à une partie du public. C'est pourquoi je pense que ce que font dans une certaine mesure des groupes comme BuzzFeed, alternant divertissement et prise de position, est intéressant (à condition d'être bien fait).

Les salarié•e•s de GM&S en Creuse menacent de faire sauter l'usine qui risque la liquidation - Source

Tout est politique. Ce qu'il se passe au niveau des gouvernements, bien sûr, mais pas seulement : ce qui a lieu dans le cadre du travail, dans l'espace public, dans l'espace privé, dans sa consommation, dans la représentation, dans les produits culturels, en fait partout où des individus interagissent ou sont présentés.
C'est pourquoi il est important de se mobiliser partout, d'être attentif dans les rapports entre individus, de se remettre en question.
Même si j'ai beaucoup vanté le pouvoir de l'action politique, je nuancerai en disant que c'est une lutte souvent décourageante, avec l'impression de se mettre à dos tout le monde.
Il ne faut pas non plus faire la course aux meilleur•e•s militant•e•s. Ce n'est pas grave de se tromper, d'avoir fait des erreurs, du moment qu'on s'excuse, qu'on ne les refait plus et qu'on tente de les réparer dans la mesure du possible. Certain•e•s, pour diverses raisons, ne peuvent pas prendre part à toutes les luttes qu'iels souhaiteraient. Il est tout à fait compréhensible que certain•e•s ne souhaitent pas se mettre en danger (face à un environnement, un entourage, un emploi, des revenus, etc.) pour des raisons politiques. Chacun•e peut aider à sa manière, à son échelle, quand iel le souhaite et le peut.
Les initiatives individuelles sont des petites pierres qui consolident progressivement l'édifice bâti par les actions collectives. Les deux sont à encourager.
Bref, c'est compliqué, la route sera longue, mais je pense qu'on finira par y arriver. Mais il faut se mobiliser, car si on ne s'occupe pas de la politique, elle s'occupe de nous...

Et vous ? Qu'attendez-vous du futur du monde et de la politique ? Quel rôle devrait avoir la gauche dans ceux-ci ?

ℒ‧ℒ

      

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