Je suis non-binaire
Coming-out : Je ne suis pas un homme. Je ne suis pas une femme. Je suis non-binaire. |
Notes de contenu : cet article contient des évocations de transphobie.
Edit (03/2018) : cet article parle surtout de non-binarité d'un point de vue individuel, personnel. Si vous cherchez plutôt des réflexions sur l'inscription de la non-binarité dans le champ social du genre, lisez plutôt "Repolitiser la non-binarité et le genre".
Edit (29/04/2017) : cet article a été réécrit, puisque l'original ne représentait plus mon point de vue et contenait des informations inexactes ou maladroitement expliquées. Cet article étant un des plus consultés de mon blog, j'ai préféré le réécrire, bien qu'ayant déjà fait d'autres articles plus actualisés, afin de ne pas ajouter à la confusion.
Par souci de transparence, vous pouvez consulter l'ancienne version ici.
Je n'aime pas beaucoup parler de moi sur ce blog. Une des raison pour cela est parce que très souvent lorsque quelqu'un se met à parler de soi, on finit par chercher à savoir s'il s'agit d'une femme ou un homme. Et bien dans mon cas, ça va être compliqué. Pour mettre les choses au clair : je ne suis ni l'un ni l'autre, je suis de genre non-binaire.
Cet article fait donc office en quelque sorte de coming-out public.
Note : Ce que je dis dans cet article représente ma vision des choses à un instant T. Je parle ici pour moi et mon avis n'est pas représentatif de toute la communauté non-binaire. Vous pouvez utiliser la section commentaire pour partager votre propre expérience ou apporter des nuances.
Clarification des termes
Au préalable, voici des définitions simplifiées de quelques termes :
- Cisgenre : personne s'identifiant au genre assigné à sa naissance
- Transgenre : personne ne s'identifiant pas au genre assigné à sa naissance
- Dyadique : personne dont les organes sexuels ont été clairement définis à la naissance
- Intersexe : personne dont les organes sexuels n'ont pas pu être clairement définis à la naissance (peut également être découvert plus tard)
- Binaire : personne s'identifiant à un genre binaire (femme ou homme)
- Non-binaire : personne ne s'identifiant pas à un genre binaire (ou pas complètement)
Le genre qui nous est assigné à la naissance dépend des organes sexuels, ce qui rentre en conflit avec ce que l'on peut ressentir.
Nous vivons dans une société qui assume que la norme serait que tout le monde soit cisgenre, dyadique et binaire. Mais ce n'est pas le cas, ce qui pose de nombreux problèmes :
- Les personnes transgenres subissent de la transphobie au quotidien : refus de reconnaître leur genre, difficultés administratives, de logement, d'accès à l'emploi, précarité, mégenrage, moqueries, insultes, violences, meurtres, viols, etc.
- Les personnes intersexes subissent dès la naissance une opération non consentie les assignant à un unique organe sexuel, duquel dépendra leur genre
- Les personnes non-binaires ne sont pas reconnues et constamment invisibilisées
Les personnes non-binaires sont également dans une certaine mesure des personnes transgenres puisque les genres assignés à la naissances sont uniquement binaires (on y reviendra).
N'étant a priori pas intersexe je n'en parlerais pas plus mais je vous conseille d'aller voir ce qu'en disent les concerné•e•s.
Il n'existe pas une seule façon d'être de genre non-binaire. Voici quelques identités non-binaires parmi les plus communes :
Bref, la non-binarité se faisant de plus en plus connaître, de plus en plus de personnes découvrent qu'elle correspond ce qu'iels peuvent ressentir et s'en réclament, comme c'est également mon cas.
Bien que j'ai toujours su qu'il y avait un "décalage" dans mon genre par rapport à ce qu'on attendait moi, ma découverte de ma non-binarité est assez récente, parce que je ne pensais que mon ressenti était légitime, que je n'avais pas de mots pour le décrire et que j'ignorais que d'autres personnes pouvaient avoir des expériences proches de la mienne.
J'ai été assignæ "homme" à la naissance mais je m'y suis toujours senti•e éloigné. Depuis tout•e petit•e, j'ai eu un comportement assez différent des autres, en particulier de genre masculin. Très jeune, ça ne me posait pas de problèmes, je ne voyais pas le genre des autres et j'avais l'impression qu'on ne voyait pas mon genre.
Mais en fin de primaire et surtout pendant les années collège, alors que chacun•e entrait dans la pré-adolescence et l'adolescence, le genre a pris une place importante, les garçons devait être avec les garçons, les filles avec les filles, et tout le monde devait se comporter comme les autres. C'est là que j'ai senti ma différence. Je n'étais pas comme les autres garçons.
J'ai tenté de faire comme si c'était le cas : j'ai tenté de me comporter de la manière qu'on attendait de moi, en m'intéressant au foot, en faisant des blagues salaces, en traînant avec des gros durs, etc. Mais tout cela n'était qu'une illusion pour tenter de me convaincre que j'étais comme les autres et j'ai fini par m'en rendre compte.
Ayant un important retard pubertaire et étant harcelæ, je me suis éloignæ physiquement, mentalement et socialement de mes camarades masculins et j'ai peu à peu arrêté d'essayer d'être ce que je n'étais pas et j'ai petit à petit appris à m'accepter comme je l'étais.
Au lycée, les choses se sont mieux passées malgré les nombreux commentaires sur mes cheveux longs, sur mon apparence fragile et un inconfort vis à vis de mon corps. Faute de meilleurs moyens de me décrire, je me voyais alors comme un garçon divergent, un peu efféminé, différent.
La fac a été très bénéfique pour moi puisque j'ai eu l'impression que l'on pouvait être accepté•e comme on était. C'est dans ce contexte ouvert et inclusif et surtout avec l'aide d'internet que j'ai vraiment commencé à me construire, dans mon identité, dans mes orientations et dans mes convictions.
C'est notamment par internet et mes prises de conscience féministes et queers que j'ai appris que ce que je ressentais avait un nom : la non-binarité. J'ai mis un peu de temps à l'accepter pleinement, notamment parce que je ne supportais pas être mis•e dans une case, fut-elle une sorte de "non-case". Mais au fur et à mesure que je me reconnaissais dans ce que d'autres pouvaient dire, ressentir ou penser, je me suis rendu-compte que cette case me convenait et que je voulais lutter à partir de cette case pour la légitimer et contre les oppressions de genre.
Je suis donc non-binaire, maverique si on veut rentrer dans les détails, donc "strictement" non-binaire puisque le terme maverique désigne celleux qui s'identifient à un genre indépendant de la binarité femme-homme (même pas quelque part entre). J'approche donc mon genre de cette manière, je ne suis ni femme, ni homme, même si c'est une conception que beaucoup ont du mal à appréhender.
Si vous voulez vous renseigner sur ce qu'est être maverique, je vous recommande ce que Vesper fait sur YouTube (je traduis certaines de ses vidéos) ou sur Tumblr, puisque c'est la personne qui a créé le terme et que je me reconnais assez bien dans les rapports qu'iel entretient avec son genre.
J'utilise principalement les pronoms æl ou iel et des accords neutres ou inclusifs quand je peux me le permettre, c'est à dire principalement en ligne (je ne suis out dans la vie de tous les jours qu'auprès de quelques personnes).
Si j'utilise toujours mon prénom de naissance, Lionel, qui ne me dérange pas (ce n'est pas le cas de tou•te•s), j'en ai aussi pris d'autres, à savoir un plus féminin, Lydia, et un plus neutre, Lynn. Plus généralement j'aime bien la lettre L et j'aime bien être désignæ avec un double L entrelacé, d'où mon pseudo (ce qui n'est pas forcément pratique oralement et dans la vie de tous les jours).
Être non-binaire, c'est faire face continuellement à des gens qui pensent que ce n'est pas un ressenti valide. C'est aussi très souvent se remettre en question, avoir l'impression continue d'être une fraude. C'est être mégenré•e, appelé•e par des pronoms et prénoms qui ne nous conviennent pas.
Déranger les esprits coincés dans une vision binaire et cisnormative peut être une source de satisfaction mais c'est surtout une source de violences subies, en particulier lorsqu'on transitionne physiquement, socialement.
Dans mon cas, physiquement mon apparence est plus ou moins androgyne, mais ayant majoritairement des traits masculins, elle me vaut d'être le plus souvent (bien que pas toujours) genræ au masculin.
C'est pour cette raison que je ne m'identifie pas directement comme trans (plus comme non-cisgenre), j'ai le privilège d'échapper aux aspects les plus violents de la transphobie et ne fait face "que" à la négation de mon identité, aux injonctions au virilisme et à l'hétréo-cis-normativité. Mais je me sens fortement connectæ à la cause trans et tente de la soutenir du mieux que je le peux.
Les personnes auprès de qui je suis out l'ont plutôt bien pris et essaient de faire de leur mieux pour m'accepter comme je suis, même les erreurs sont fréquentes et relativement blessantes. Mais là-dessus, je suis encore assez privilégiæ, certain•e•s n'ont pas la chance que j'ai.
Quand au reste du monde, je sers les dents quand on me mégenre et fait avec.
Ma non-binarité est aussi militante, elle soutient mes camarades victimes de diverses oppressions, oppressions de genre et d'autres. Cependant, je préfère baser mes actions politiques en priorité sur la lutte contre les violences plutôt que à partir de ma propre identité. Consultez les chiffres affolants publiés à chaque Trans Day Of Remembrance sur le nombre de personnes trans* assassinées, les rapports ou divers témoignages sur la transphobie, il y a de quoi faire...
Bref, mon expérience de la non-binarité n'est pas représentative de l'entièreté de la communauté, trans ou non-binaire. Renseignez-vous si vous souhaitez avoir plus d'informations sur d'autres expériences ou partagez la votre.
Pour finir ce coming-out, j'aimerais inviter tout•e•s celleux qui ont déjà douté de leur genre à s'informer davantage (sur la transidentité, la non-binarité, etc.), parce que dans mon cas, comprendre que j'étais non-binaire m'a fait beaucoup avancer. Ce n'est pas toujours facile mais si vous êtes en mesure de le faire, assumer ce qu'on est peut aider.
J'encourage tout le monde, concerné•e ou pas, à s'intéresser à la cause LGBTQI+ et à nous soutenir dans nos luttes.
Nous pouvons changer la société vers quelque chose où le genre n'est plus déterminé pour autrui et où il n'est pas le facteur qui nous donne notre place et notre rôle dans cette société.
ℒ‧ℒ
N'étant a priori pas intersexe je n'en parlerais pas plus mais je vous conseille d'aller voir ce qu'en disent les concerné•e•s.
Qu'est-ce que la non-binarité ?
La non-binarité désigne donc tout•e•s celleux qui ne se reconnaissent pas dans la binarité des genres, que ce soit des personnes qui s'identifient à plusieurs genres à la fois, des personnes qui s'identifient à un genre différent de femme ou homme, ou encore des personnes qui ne s'identifient à aucun genre.Il n'existe pas une seule façon d'être de genre non-binaire. Voici quelques identités non-binaires parmi les plus communes :
- Neutre, neutrois, androgyne : personne s'identifiant à un genre neutre et/ou situé entre femme et homme
- Genderqueer : personne dont le genre diverge de la distinction binaire femme/homme (parfois synonyme de non-binaire)
- Agenre : personne qui ne s'identifient à aucun genre
- Bigenre, trigenre, etc. : personne s'identifiant à plusieurs genres à la fois
- Xénogenre : personne associant son genre à quelque chose d'autre
- Demi-* (demi-boy, demi-girl,...) : personne ne s'identifiant qu'en partie à un genre
- Genderfluid : personne qui change parfois de(s) genre(s) auquel iel s'identifie
- Genderflux : personne qui change parfois d'intensité d'identification à un(des) genre(s)
Il y en a d'autres et le sens qu'il y a derrière chaque terme peut changer d'une personne à l'autre ou une personne se reconnaissant dans une de ces définitions pourra employer un terme différent.
De nombreuses personnes ne se reconnaissent pas dans le genre qui leur fut assigné à la naissance, ce qui se traduit parfois par un inconfort (dysphorie) vis à vis de son propre corps, de sa voix, de son apparence, de la manière dont on est perçu•e socialement, etc.
Ainsi, certaines personnes assignées "femme" savent qu'elles sont "homme", certaines personnes assignées "homme" savent qu'elles sont "femme". D'autres, quel que soit leur genre assigné à la naissance, ont du mal à savoir où iels se situent ou savent qu'iels ne rentrent pas dans les catégories "femme" ou "homme" et pourront s'identifier à un genre non-binaire.
Pour certain•e•s, une transition physique et/ou sociale vers un genre auquel on ne les avaient pas assignés leur permet de limiter (dans une certaine mesure, leur identité étant perpétuellement remise en cause par le reste de la société) le décalage qu'iels peuvent ressentir, notamment parce qu'iels seront alors perçu•e•s socialement du genre qui leur correspond.
La transition est malheureusement très mal acceptée dans notre société, ce qui pousse à la transphobie, des actes quotidiens (parfois inconscients) de violences et de refus de l'acception des personnes qui transgressent l'assignation du genre qui leur fut faite à la naissance.
Le genre est une construction sociale. C'est ce que montrent les gender studies : le genre s'est construit afin de légitimer une domination systémique de l'homme sur la femme. Ces genres sont construits sur des stéréotypes (qui évoluent d'ailleurs selon le lieu et le temps) et sur une perception sociale plus que sur des éléments biologiques.
La binarité des genres et la détermination du genre à la naissance sont des également des constructions sociales issues principalement de la diffusion mondiale du modèle capitaliste, patriarcal, colonial, occidental qui a instauré la norme qui veut que le genre est assigné à la naissance en fonction des organes génitaux.
En effet, un peu partout existaient et existent encore des civilisations où le genre ne s'aborde pas de cette manière. Les Two-Spirits natifs américains est un exemple souvent cité, mais il y en a d'autres, comme le montre cette carte interactive :
De nombreuses personnes ne se reconnaissent pas dans le genre qui leur fut assigné à la naissance, ce qui se traduit parfois par un inconfort (dysphorie) vis à vis de son propre corps, de sa voix, de son apparence, de la manière dont on est perçu•e socialement, etc.
Ainsi, certaines personnes assignées "femme" savent qu'elles sont "homme", certaines personnes assignées "homme" savent qu'elles sont "femme". D'autres, quel que soit leur genre assigné à la naissance, ont du mal à savoir où iels se situent ou savent qu'iels ne rentrent pas dans les catégories "femme" ou "homme" et pourront s'identifier à un genre non-binaire.
Pour certain•e•s, une transition physique et/ou sociale vers un genre auquel on ne les avaient pas assignés leur permet de limiter (dans une certaine mesure, leur identité étant perpétuellement remise en cause par le reste de la société) le décalage qu'iels peuvent ressentir, notamment parce qu'iels seront alors perçu•e•s socialement du genre qui leur correspond.
La transition est malheureusement très mal acceptée dans notre société, ce qui pousse à la transphobie, des actes quotidiens (parfois inconscients) de violences et de refus de l'acception des personnes qui transgressent l'assignation du genre qui leur fut faite à la naissance.
Le genre est une construction sociale. C'est ce que montrent les gender studies : le genre s'est construit afin de légitimer une domination systémique de l'homme sur la femme. Ces genres sont construits sur des stéréotypes (qui évoluent d'ailleurs selon le lieu et le temps) et sur une perception sociale plus que sur des éléments biologiques.
La binarité des genres et la détermination du genre à la naissance sont des également des constructions sociales issues principalement de la diffusion mondiale du modèle capitaliste, patriarcal, colonial, occidental qui a instauré la norme qui veut que le genre est assigné à la naissance en fonction des organes génitaux.
En effet, un peu partout existaient et existent encore des civilisations où le genre ne s'aborde pas de cette manière. Les Two-Spirits natifs américains est un exemple souvent cité, mais il y en a d'autres, comme le montre cette carte interactive :
Bref, la non-binarité se faisant de plus en plus connaître, de plus en plus de personnes découvrent qu'elle correspond ce qu'iels peuvent ressentir et s'en réclament, comme c'est également mon cas.
Ma découverte de ma non-binarité
Bien que j'ai toujours su qu'il y avait un "décalage" dans mon genre par rapport à ce qu'on attendait moi, ma découverte de ma non-binarité est assez récente, parce que je ne pensais que mon ressenti était légitime, que je n'avais pas de mots pour le décrire et que j'ignorais que d'autres personnes pouvaient avoir des expériences proches de la mienne.
J'ai été assignæ "homme" à la naissance mais je m'y suis toujours senti•e éloigné. Depuis tout•e petit•e, j'ai eu un comportement assez différent des autres, en particulier de genre masculin. Très jeune, ça ne me posait pas de problèmes, je ne voyais pas le genre des autres et j'avais l'impression qu'on ne voyait pas mon genre.
Mais en fin de primaire et surtout pendant les années collège, alors que chacun•e entrait dans la pré-adolescence et l'adolescence, le genre a pris une place importante, les garçons devait être avec les garçons, les filles avec les filles, et tout le monde devait se comporter comme les autres. C'est là que j'ai senti ma différence. Je n'étais pas comme les autres garçons.
J'ai tenté de faire comme si c'était le cas : j'ai tenté de me comporter de la manière qu'on attendait de moi, en m'intéressant au foot, en faisant des blagues salaces, en traînant avec des gros durs, etc. Mais tout cela n'était qu'une illusion pour tenter de me convaincre que j'étais comme les autres et j'ai fini par m'en rendre compte.
Ayant un important retard pubertaire et étant harcelæ, je me suis éloignæ physiquement, mentalement et socialement de mes camarades masculins et j'ai peu à peu arrêté d'essayer d'être ce que je n'étais pas et j'ai petit à petit appris à m'accepter comme je l'étais.
Au lycée, les choses se sont mieux passées malgré les nombreux commentaires sur mes cheveux longs, sur mon apparence fragile et un inconfort vis à vis de mon corps. Faute de meilleurs moyens de me décrire, je me voyais alors comme un garçon divergent, un peu efféminé, différent.
La fac a été très bénéfique pour moi puisque j'ai eu l'impression que l'on pouvait être accepté•e comme on était. C'est dans ce contexte ouvert et inclusif et surtout avec l'aide d'internet que j'ai vraiment commencé à me construire, dans mon identité, dans mes orientations et dans mes convictions.
C'est notamment par internet et mes prises de conscience féministes et queers que j'ai appris que ce que je ressentais avait un nom : la non-binarité. J'ai mis un peu de temps à l'accepter pleinement, notamment parce que je ne supportais pas être mis•e dans une case, fut-elle une sorte de "non-case". Mais au fur et à mesure que je me reconnaissais dans ce que d'autres pouvaient dire, ressentir ou penser, je me suis rendu-compte que cette case me convenait et que je voulais lutter à partir de cette case pour la légitimer et contre les oppressions de genre.
Je suis donc non-binaire, maverique si on veut rentrer dans les détails, donc "strictement" non-binaire puisque le terme maverique désigne celleux qui s'identifient à un genre indépendant de la binarité femme-homme (même pas quelque part entre). J'approche donc mon genre de cette manière, je ne suis ni femme, ni homme, même si c'est une conception que beaucoup ont du mal à appréhender.
Si vous voulez vous renseigner sur ce qu'est être maverique, je vous recommande ce que Vesper fait sur YouTube (je traduis certaines de ses vidéos) ou sur Tumblr, puisque c'est la personne qui a créé le terme et que je me reconnais assez bien dans les rapports qu'iel entretient avec son genre.
J'utilise principalement les pronoms æl ou iel et des accords neutres ou inclusifs quand je peux me le permettre, c'est à dire principalement en ligne (je ne suis out dans la vie de tous les jours qu'auprès de quelques personnes).
Si j'utilise toujours mon prénom de naissance, Lionel, qui ne me dérange pas (ce n'est pas le cas de tou•te•s), j'en ai aussi pris d'autres, à savoir un plus féminin, Lydia, et un plus neutre, Lynn. Plus généralement j'aime bien la lettre L et j'aime bien être désignæ avec un double L entrelacé, d'où mon pseudo (ce qui n'est pas forcément pratique oralement et dans la vie de tous les jours).
Mon expérience de la non-binarité
Être non-binaire, c'est faire face continuellement à des gens qui pensent que ce n'est pas un ressenti valide. C'est aussi très souvent se remettre en question, avoir l'impression continue d'être une fraude. C'est être mégenré•e, appelé•e par des pronoms et prénoms qui ne nous conviennent pas.
Déranger les esprits coincés dans une vision binaire et cisnormative peut être une source de satisfaction mais c'est surtout une source de violences subies, en particulier lorsqu'on transitionne physiquement, socialement.
Dans mon cas, physiquement mon apparence est plus ou moins androgyne, mais ayant majoritairement des traits masculins, elle me vaut d'être le plus souvent (bien que pas toujours) genræ au masculin.
C'est pour cette raison que je ne m'identifie pas directement comme trans (plus comme non-cisgenre), j'ai le privilège d'échapper aux aspects les plus violents de la transphobie et ne fait face "que" à la négation de mon identité, aux injonctions au virilisme et à l'hétréo-cis-normativité. Mais je me sens fortement connectæ à la cause trans et tente de la soutenir du mieux que je le peux.
Les personnes auprès de qui je suis out l'ont plutôt bien pris et essaient de faire de leur mieux pour m'accepter comme je suis, même les erreurs sont fréquentes et relativement blessantes. Mais là-dessus, je suis encore assez privilégiæ, certain•e•s n'ont pas la chance que j'ai.
Quand au reste du monde, je sers les dents quand on me mégenre et fait avec.
Ma non-binarité est aussi militante, elle soutient mes camarades victimes de diverses oppressions, oppressions de genre et d'autres. Cependant, je préfère baser mes actions politiques en priorité sur la lutte contre les violences plutôt que à partir de ma propre identité. Consultez les chiffres affolants publiés à chaque Trans Day Of Remembrance sur le nombre de personnes trans* assassinées, les rapports ou divers témoignages sur la transphobie, il y a de quoi faire...
Bref, mon expérience de la non-binarité n'est pas représentative de l'entièreté de la communauté, trans ou non-binaire. Renseignez-vous si vous souhaitez avoir plus d'informations sur d'autres expériences ou partagez la votre.
Pour finir ce coming-out, j'aimerais inviter tout•e•s celleux qui ont déjà douté de leur genre à s'informer davantage (sur la transidentité, la non-binarité, etc.), parce que dans mon cas, comprendre que j'étais non-binaire m'a fait beaucoup avancer. Ce n'est pas toujours facile mais si vous êtes en mesure de le faire, assumer ce qu'on est peut aider.
J'encourage tout le monde, concerné•e ou pas, à s'intéresser à la cause LGBTQI+ et à nous soutenir dans nos luttes.
Nous pouvons changer la société vers quelque chose où le genre n'est plus déterminé pour autrui et où il n'est pas le facteur qui nous donne notre place et notre rôle dans cette société.
ℒ‧ℒ
Quelques liens utiles
Autour de la non-binarité : 3615 Non-binaire, Groupe Facebook francophone
Associations LBGTQ+ : Centre LGBT, Inter-LGBT, MAG Jeunes, Genres pluriels
Associations autour de la transidentité : Chrysalide, OUTrans, ANT
Associations autour des personnes intersexes : Collectif Intersexes & Allié.e.s, Organisation Internationale des Intersexes
Note : Les commentaires antérieurs à avril 2017 ont été postés en réponse à l'ancienne version de cet article.
Merci beaucoup pour cet article :3 c'est très clair, bien expliqué. Je questionne depuis quelques temps mon identité et si je ne pense pas me considérer comme non-binaire, gender-fluid semble assez bien me convenir. Oui c'est drôle de dire ça comme ça, mais ça aide de savoir ce qu'on est et ce qu'on n'est pas.
RépondreSupprimerEn tout cas, bravo pour ton coming-out. Je navigue un peu au travers de tes articles depuis que je te suis sur Twitter et c'est vraiment bien écrit et bien documenté. Je ne connaissais pas du tout les mavériques donc merci pour l'info, ça fait encore plein de données à creuser.
Merci à toi !
SupprimerEffectivement, mettre des mots sur ce qu'on ressent peut aider. Je n'aime pas être catégorisé.e mais pouvoir mettre des mots sur ce que je suis m'a beaucoup aidé à m'accepter, à me sentir légitime d'exister et à comprendre que je n'étais pas seul.e.
Gender-fluid peut tout à fait être considéré non-binaire, mais c'est à chacun•e de juger les mots qui lui conviennent et d'y mettre la signification qu'iels souhaitent. J'avais prévu de faire un lexique sur le genre, mais je ne sais pas si c'est la meilleure des idées, puisque j'estime que chacun•e peut utiliser un mot avec sa propre signification (par exemple, pour certain•e•s, les non-binaires sont transgenres, pour d'autres non. Mais c'est à chacun•e de décider d'ellui-même si iels se considèrent transgenre, NB, bi, pan, etc.)
Sinon, navigue comme tu veux parmi mes articles, mais certaines choses que j'ai écrites ne me conviennent plus vraiment. Je les laisse pour illustrer la progression de ma pensée, mais ce serait à refaire, je les écrirais différemment...
Bon, et moi, promis, je vais prendre le temps d'aller voir ce que tu fais, parce que ça m'a l'air très bien ! ;)
Hello LL !
RépondreSupprimerBel édito ! Tu poses des questions très intéressantes sur le genre dans la langue notamment.
Tu dis notamment que pour écrire au féminin il faut "faire une effort" comme ajouter un "e" par exemple. J'ai lu un autre article qui posait les choses à l'envers, il disait que le genre masculin à l'écrit à quelqeue chose en moins, il n'est pas doté de "e" ou autre spécifications du féminin. A ce titre il est plus usuel, plus commun et moins riche... à méditer, je trouve cette approche intéressante.
Autrement pour le symbole choisi neutrois, je le trouve très triste... l'ensemble vide, désignant un ensemble ne contenant personne ou rien ? C'est dommage. Ça aurait pu être le symbole infini, pour signifier l'infini des possibles, qu'en penses tu ?
Bonne journée
Merci !
SupprimerLa langue française est très genrée et ignore le neutre, le masculin servant d'équivalent. C'est une reproduction de la domination patriarcale dans la langue.
On peut peut-être voir dans le "e" féminin un enrichissement et une lutte pour se démarquer de la forme de base.
Personnellement, je ne le vois pas comme ça. La forme féminine est reléguée à un dérivé de la forme masculine qui sert de norme.
En ce qui concerne le symbole neutrois, c'est revendiqué. Il n'a pas être triste ou joyeux, c'est un symbole. L'ensemble vide peut désigner l’absence de genre ou la démarcation aux genres traditionnels. L'infini contient ces genres, ce qui ne correspond pas forcément à l'idéologie neutroise.
Mais d'autres revendiquent déjà l'utilisation de l'infini dans les luttes trans* (cf. https://fr.pinterest.com/pin/575123814888787408/).
Cela dit chacun•e est libre d'utiliser un symbole pour se définir, donc si ça convient à certain•e•s, pourquoi pas !
Bonne journée !